Cette procédure très largement utilisée et constituant très souvent le seul moyen de parvenir au recouvrement des sommes dues en vertu d’un titre exécutoire, décourage de part des délais anormalement longs, que se soit au niveau de son aboutissement qu’au niveau du reversement des sommes allouées au créancier.
Tout le contraire de ce qu’elle devrait être, à savoir une mesure d’exécution efficace et équilibrée dans le respect des intérêts du créancier et des droits du débiteur.
C’est dans cette optique qu’une proposition de loi défendue par la chambre nationale des commissaires de justice est venue défendre l’intérêt de reprendre en profondeur cette procédure afin de lui redonner sa pleine effectivité.
Ainsi, l’Assemblée nationale, le 10 octobre, puis le Sénat le 11 octobre, ont définitivement adopté la Loi d’orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027 à une très large majorité.
Cette loi déjudiciarise de manière partielle la procédure et transfert sa gestion administrative du greffe du juge de l’exécution, à un Commissaire de justice répartiteur.
Désormais, la gestion entière de la procédure est confiée aux Commissaires de justice et permet d’accélérer le recouvrement des créances assorties d’un titre exécutoire ainsi que le reversement au créancier des sommes dues, tout en maintenant au bénéfice du débiteur la possibilité de former un recours, et au juge celui d’opérer un contrôle tout au long de la procédure ou a posteriori.
En renforçant son action en matière d’exécution forcée, la loi reconnaît au Commissaire de justice la capacité de garantir la régularité de la procédure dans le respect des droits des parties.
Elle permet enfin, de décharger les juridictions largement encombrer et en sous effectif et à l’Etat de faire des économies substantielles.
Cette réforme devrait entrer en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er juillet 2005
I- Une mise en œuvre simplifiée.
La procédure s’articule désormais autour de deux actes à savoir un commandement et un procès verbal de saisie.
A- Le commandement
La procédure débute par la signification d’un commandement au débiteur, exit la requête aux fins de saisie des rémunérations.
Ce commandement fait courir un délai d’un mois et ce n’est qu’à son terme que le créancier pourra procéder à la saisie entre les mains de l’employeur du débiteur.
Il semble que ce commandement se distinguera du commandement de payer avant saisie vente de part le but poursuivi et que son délai aura comme premier objectif de préserver la tentative de conciliation.
B- Le procès-verbal de saisie
A défaut d’un accord sur un échéancier conclu durant le délai d’un mois conféré par le commandement, la procédure se poursuit avec la signification d’un procédure verbal de saisie au tiers saisie, exit l’audience dite de conciliation.
Ce procès verbal doit être établi dans un délai de trois mois à compter de la délivrance dudit commandement, et ce à peine de nullité.
1- Les obligations du tiers saisi
Il incombe au tiers saisi à savoir l’employeur, de déclarer au créancier d’une part, le lien existant avec le débiteur, le montant de la rémunération versée à ce dernier ainsi que l’existence d’éventuelles saisies antérieures. Il semble important de rappeler que ces informations ne sont ni plus ni que celles nécessaires à l’accomplissement de la saisie et communiquées à ce jour au greffe.
Cette obligation déclarative se double d’une obligation de paiement entre les mains du commissaire de justice répartiteur.
A défaut de remplir ses obligations, le tiers saisi peut voir sa responsabilité engagée.
S’agissant de son obligation d’information, le tiers saisi qui s’abstient sans motif ou dans l’hypothèse d’une déclaration mensongère ou inexacte peut être condamné à une amende civile.
S’agissant de l’obligation de paiement et dans l’hypothèse d’un défaut, le tiers peut être condamné au paiement des retenus qui auraient dû être opérées.
2- Le commissaire de justice répartiteur.
Il s’agit de l’un des éléments novateurs de cette réforme.
Cette nouvelle fonction du commissaire de justice permet d’assurer la direction de la procédure. Ainsi au niveau de chaque juridiction, seront désignés un ou plusieurs répartiteurs, qui seront prochainement formés à cet effet.
Il semble que le choix du commissaire de justice répartiteur soit laissé au choix du créancier parmi ceux qui figurent sur la liste fournie par la chambre nationale des commissaires de justice.
Une fois désigné, l’identité du répartiteur est communiquée au tiers saisi et au débiteur.
Celui-ci aura pour mission de recevoir les paiement émanant du tiers saisi, de les reverser au créancier saisissant et si besoin en effectuant une répartition dans l’hypothèse d’une pluralité de créanciers.
Tout comme dans la procédure actuelle, tout créancier pourra se joindre à une saisie existante par voie d’intervention.
II- Une équité préservée.
La simplification et le gain de temps qui découlent de cette réforme n’ont pas pour autant mis à mal les droits du débiteur, ni ceux du tiers saisi et d’éventuels créanciers privilégiés.
La saisie des rémunérations reste une mesure d’exécution forcée, par conséquent sa mise en œuvre à titre conservatoire demeure interdite.
De même, les créanciers d’aliments qui actionnent via la procédure de paiement direct ou l’état qui intervient via la saisie administrative à tiers détenteur, restent prioritaires.
A- Au niveau des options offertes au débiteur.
1-Le procès verbal d'accord.
L’audience de conciliation n’est plus, exit les dates d’audience fixées à plusieurs mois et les renvois parfois multiples.
Pour autant la nouvelle loi offre au créancier et au débiteur, la possibilité d’établir un procès verbal d’accord sur les modalités de paiement de la dette.
Lors de la signification du commandement, le commissaire de justice informe le débiteur de la possibilité de parvenir à un accord avec son créancier.
Cet accord se concrétise par l’établissement de ce procès verbal qui permet de suspendre la saisie des rémunérations.
Et comme par le passé, la procédure de saisie pourra reprendre lorsque le débiteur ne respecte pas son engagement ou si le créancier saisissant se voit signifier un acte d’intervention formé par un autre créancier.
2-Le recours au juge de l'exécution
Bien que l’intervention du juge soit écartée lors de l’audience dite de conciliation et que le transfert de compétence soit effectué au bénéfice des Commissaires de justice, la loi permet toujours un contrôle a posteriori par le juge de l’exécution.
Ainsi le débiteur pourra saisir le juge de l’exécution à tout moment.
Ce recours n’aura pas d’effet suspensif sur la saisie, qui poursuivra donc ses effets le temps que la décision soit rendue, à l’exception du recours formé dans le mois qui suit la signification du commandement.
Le tiers saisi a également la possibilité de former un recours à l’encontre du débiteur.
B- Au niveau de la quote part de salaire saisissable.
Ici rien ne change, la saisie est effectuée sur la base des sommes dues à titre de rémunération, à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que se soit, pour un ou plusieurs employeurs, quels que soient le montant et la nature de sa rémunération, la forme et la nature de son contrat.
De même, la saisie continue de s’appliquer de manière proportionnelle et en suivant les seuils définis à l’article R 3252-2 du code du travail, à savoir:
La proportion dans laquelle les sommes dues à titre de rémunération sont saisissables ou cessibles, en application de l’article L. 3252-2, est fixée comme suit :
1° Le vingtième, sur la tranche inférieure ou égale à 4 170 € € ;
2° Le dixième, sur la tranche supérieure à 4 170 € et inférieure ou égale à 8 140 € ;
3° Le cinquième, sur la tranche supérieure à 8 140 € et inférieure ou égale à 12 130 € ;
4° Le quart, sur la tranche supérieure à 12 130 € et inférieure ou égale à 16 080 € ;
5° Le tiers, sur la tranche supérieure à 16 080 € et inférieure ou égale à 20 050 € ;
6° Les deux tiers, sur la tranche supérieure à 20 050 € et inférieure ou égale à 24 090 € ;
7° La totalité, sur la tranche supérieure à 24 090 € .